Bad day, good girl !
Crenoka, de son vrai nom Nastasia Paccagnini, semble se réinventer là où le vent de l’imagination la pousse. De ses premières années de vie passées aux Etats-Unis, dont elle a gardé l’anglais comme langue natale, elle s’installe en France où elle fonde à Tours le groupe Boys in Lilies empreint de dream pop, puis Thé Vanille aux influences post-rock, avant que la chanteuse, compositrice et productrice trouve, à travers son avatar Crenoka, le personnage idéal pour expérimenter une multitude d’aventures dans sa pop alternative.
Loin des effluves diaphanes intergalactiques de son précédent opus, Earth Capsules, coup de cœur Radio France de notre déléguée musicale Marjorie Rousseau en 2022, la surprenante artiste Crenoka revient sur terre avec un premier album solo, Eidolon, sorti le 9 février 2024 chez Figures Libres Records. Solo mais pas solitaire puisqu’elle évolue désormais en live, soutenue par l’agence de booking Tigre Noir, dans une formule trio aux côtés de Carla Siméon aux claviers et guitare et Mathieu Epaillard ou Rémy Fanchin aux claviers et chœurs, donnant à son set une configuration encore plus dynamique. Adepte d’expérimentations musicales qui parsèment sa pop d’électro dans des influences rock, hyperpop voire r&b, Crenoka dévoile de nouvelles facettes de sa créativité illimitée dans ces 12 titres arrangés avec la complicité de son ami Pierre Cheguillaume (Zaho de Sagazan, Degree, Yoa…) et masterisés aux prestigieux studios Ferber sous la production d’On n’est pas des Machines.
Avec Eidolon, Crenoka nous immerge dans sa réalité bien tangible mais teintée de son regard magique qui magnifie l’ordinaire. Lovés à ses côtés, au creux de ses draps, on s’immisce dans ses confidences post adolescentes peuplées de boom de fin d’année, d’animaux familiers et de crush fantasmés comme un accès secret au journal intime d’une jeune femme entre deux mondes. Après les 2 premiers singles, Tribute to The Dog I Don't Have Yet et The Wanderer A Song for Timothée Chalamet aux résonnances de liste de souhaits innocents glissés dans une bouteille à la mer, Crenoka dévoile, à la veille de la sortie d’Eidolon, son 3eme single, Having a bad day, hymne à tous nos tracas quotidiens qui s’ancrent dans la factualité comme on claque des doigts devant le visage d’un rêveur.
Sur un rythme percutant dès les premières mesures, la mélodie s’enjaille de sons synthétiques ludiques appuyés par des chœurs ironiques répondant en écho aux revendications de la chanteuse, scandées façon hip-hop. Le clip, réalisé par Judith Florent-Lapara assistée de Yannis Pachaud, fait se succéder à toute vitesse une série de micro-évènements fâcheux dont le nombre saperait toute velléité optimiste. Du réveil à l’entrejambe tâché et plus une protection périodique en réserve, au pneu crevé du vélo en passant par les toasts qui brûlent, la loi de Murphy s’illustre dans le quotidien de Crenoka version running gag. Prendre l’air ne lui réussit pas mieux, du ballon reçu en pleine tête aux fils des écouteurs emmêlés, aucun répit. Même l’instant de grâce à la vue d’un oiseau perché dans un arbre vient se heurter à la réalité triviale de sa déjection reçue en plein visage. Et la course à la loose reprend de plus belle alors que tout ce qu’elle touche tombe, le téléphone par terre et la voiture en panne…Cette journée de galères, Crenoka se la remémore au cœur d’une discothèque bondée. Elle y reste résignée, plantée au milieu de la piste, ruminant sa mauvaise humeur comme un bouclier à toute sollicitation. "I don't wanna try something, I don’t wanna drink your think, I don't wanna dance with you, I don't wanna share with you", clame-t-elle au milieu d’un déroulé d’incivilités : fumée de cigarette soufflée en plein visage, prise de selfies communs sans consentement… Alors que l’on touche ses cheveux, la bouscule, la colle en semblant ignorer l’absence de réciprocité préalable à cette grande communion qu’est la fête, s’installe une histoire de point de vue : qui du jovial abuseur ou de la renfrognée est le véritable rabat-joie ? Car si on cherche le contentement à sa manière, ensemble ou solitaire, enjoué ou calme, ivre ou sobre, à chacun la responsabilité de la respecter sans imposer la sienne. "I don't need your conversation, I don't need your intuition, Lemme have this, Lemme have this bad day !" exige-t-elle dans une ultime supplication ignorée de tous.
Le titre de son album, Eidolon, est un mot qui désigne l’apparence de ce que l’on voit et non son essence. Crenoka n’est pas la morosité qu’elle traverse, elle retrouvera sa réceptivité naturellement, sans qu’on la force. Mais, en attendant, qu’on lui fiche la paix !
▶️ Découvrez le tourbillon d’ennuis de Having a Bad Day 🔽
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■ Crenoka sera en concert le 7 juin 24 à Tours (37) au festival Aucard de Tours - Réservations sur aucard-tours.com