Cindy à tout prix
Voici une excellente surprise, la parution le 29 septembre dernier du tout 1er album de Cindy Pooch sous le précieux label indépendant InFiné, In nomine corpus réalisé par Seb Martel. Les chansons d’une jeune trentenaire franco-camerounaise où la voix est reine, Cindy la module telle une musicienne, donne des ailes à des titres originaux sur une musique plutôt minimaliste à l’émotion brute qui force l’admiration. Ces compositions originales avant-gardistes d’une rare poésie révèlent une nouvelle artiste de la chanson française dont la patte, à nulle autre pareil, est à la croisée des mondes, dont la singularité rappelle une Camille ou une Björk. D’ailleurs, Cindy Pooch ne se reconnait, ne s’enferme dans aucun style, cette autodidacte préfère se laisser guider par son instinct, grand bien nous fasse.
Née en France, Cindy Pooch a néanmoins grandi à Yaoundé au Cameroun, un écrin précieux où son grand-père écrivain l’initie à la poésie tandis que sa mère lui fait découvrir le chant. Elle s’installe ensuite à Lyon pour y poursuivre des études de lettres avant de passer un master d’aménagement du territoire. Mais la musique “a toujours fait partie de ma vie” confiera-t-elle. Pétrie de gospel, blues, jazz, musiques traditionnelles réunionnaise ou africaines, cette hyperactive chante pour le collectif Ti’Kanaki et pour A’Pagay, 2 groupes de maloya. Elle vole dorénavant de ses propres ailes en sortant un 1er EP le 7 avril 2023, Issemou, traduisez “lumière” en banen, la langue de sa grand-mère maternelle. Cinq mois plus tard, elle fait paraître In nomine corpus, un 1er album estampillé sur le champ sélection Fip (en octobre dernier), 12 titres oniriques fédérateurs parmi lesquels Nyanga dont le clip, réalisé par Marco dos Santos, est paru le 2 novembre, saisissant !
À corps et à cœur, interprété avec Marie-Ange Ladikpo et Hava Hudry, Cindy livre là un véritable manifeste. L’autrice, compositrice et interprète s’y découvre engoncée vestimentairement, à l’images de la masse des injonctions faîtes aux femmes pour être séduisantes, “pour être cute comme ils disent”, car Nyanga s’entend comme le désir de plaire à tout prix.
"Cindy s’y déshabille, couche par couche, dans un décor sans artifice en scandant tel un mantra, “je ne veux pas être nyanga” sur une électro pop polyphonique et percussive aux guitares stridentes, tout en tension, toute en intensité, stupéfiant !", livre notre déléguée musicale Sud-Est Véronique Hilaire.
"Laissez-moi raser mes sourcils et laissez-moi faire tout ce qu’il ne faut pas...je ferais comme tous ces hommes, qui font bien tout à leur aise...j’enlève doucement mon armure, pour caresser mon cœur pur...je suis belle, je ne suis pas mignonne”, clame Cindy. Nyanga sonne comme un cri de ralliement, une réponse vibrante et libératrice face au sentiment d’étouffement que peuvent ressentir les femmes pour correspondre aux codes de séduction. Cet appel au libre-arbitre, cette quête d’émancipation, d’authenticité répond avec force à la seule injonction qui vaille pour se respecter soi-même.
► Avec Nyanga, Cindy Pooch à corps perdu, nous irradie de la force d’être soi ! 🔽
► (Ré)écoutez Cindy Pooch, invitée de l’émission Côté Club le 26 septembre dernier au micro de Laurent Goumarre sur France Inter
► En concert :
- Le 7 décembre à Rennes, aux Bars en Trans - Théâtre de la Parcheminerie. Réservations sur barsentrans.com
- Le 6 mars 2024 à Paris à La Maroquinerie