Sopico : Ëpisode 0
Jean Jacques Goldman avait chanté « avec une guitare j’ai peur de rien ». Sopico lui, écrit « J’branche la guitare je fais un point avec moi-même ». Voici donc un « rap héros » car c’est bien la guitare qui a été la colonne vertébrale, ou le 5ème membre, moteur de l’énergie créative de Sopico.
Guitariste et rappeur, cela pose déjà un personnage. Qui n’hésite pas, dans chaque disque, à se raconter de façon réaliste ou en métaphore au travers d’interludes qui sont une manière de décoder sa psyché. Illustration dans ce disque : une guitare pour ouvrir le bal, un groupe de rock légendaire Led Zeppelin cité façon auto tune, et une curieuse mathématique de la musique.
Sopico a mis un tréma sur le E de son Ëpisode 0 qui est le titre de son EP 6 titres. Le tréma est le symbole d’une invitation à prendre conscience de sa vision et de sa valeur, pour pouvoir l’exprimer et la partager ensuite. Il y a trois ans, il publiait un premier EP qu’il avait baptisé Episode 1. C’est donc une sorte de cheminement à l’envers pour signifier, avec humilité, que chaque nouveau disque est une forme de recommencement. Le recommencement pour Sopico, c’est la rencontre décisive avec Yodélice, archange du folk, producteur de la chanteuse Jain et grand Mc de la production des derniers albums du King Johnny Hallyday.
Sopico ainsi, pousse les murs de son propre univers et décloisonne un peu plus cette hybridation qui fait le son d’aujourd’hui, ce qui offre à sa mélancolie naturelle, une sincérité décomplexée qui manque souvent au rap actuel. Et qui dans cet EP donne l’une de ses plus belles chansons. Son thème ? L’inspiration ou plus précisément la peur du syndrome d’Icare, la crainte de la page blanche… Un saxo qui chiale, et cette autre phrase écrite par Sopico « Les chansons les plus belles ont des plumes étranglées/Les chansons les plus vraies sont celles qui en témoignent ». Comme l’un de ses héros, Kurt Cobain, il donne à rêver et à pleurer. Lui qui avouait « mon plus beau jour fut celui où j’appris à pleurer à volonté ».
Sopico est un Parisien parfumé à la Kabylie algérienne de ses parents. Avec des larmes et du désir. Du spleen et de l’envie. Et, en guise de porte bonheur, ce diastème. Les dents du bonheur de Sopico qui ne lui font pas perdre sa lucidité, pour écrire « d’où je viens, ne jamais oublier que l’on peut quasiment tout perdre en une seconde ». Sopico, saisi par la fièvre de l’homme blessé, semble toujours chercher dans sa musique une sorte de paradis perdu.
Réécoutez la chronique de Didier Varrod vendredi 12 juin sur franceinter.fr