Jean-Michel Dupont et Mezzo ont déjà publié ensemble Love in Vain (Glénat, 2014), portrait très remarqué du bluesman Robert Johnson, traduit en quatorze langues et récompensé en 2015 par le Prix des Libraires de Bande Dessinée.
Ancien journaliste, Jean-Michel Dupont a écrit dans la revue Rock au début des années 80 puis dans plusieurs revues de cinéma. Il a également été concepteur-rédacteur dans la publicité.
En 2017, il cosigne avec Eddy Vaccaro Les Gueules rouges (Glénat), western décalé à résonances sociales, sacré meilleure BD de l’année aux Étoiles du journal Le Parisien. En 2021, il sort avec l’Italien Roberto Baldazzini Sweet Jayne Mansfield (Glénat), portrait tragique du mythique sex-symbol hollywoodien, préfacé par Jean-Pierre Dionnet. Sous le pseudonyme de J.-M. Goum, il est également l’auteur des Nuits assassines (Casterman), un polar fantastique dessiné par le Coréen Byun Ki-hyun. À ses heures perdues, il joue de la guitare (en gaucher), avec une nette prédilection pour le blues.
Extrait interview : Jimi Hendrix a connu une enfance misérable, c’est un autre point commun avec Robert Johnson (Love in Vain)... Misérable et sordide avec des traumatismes à répétition, à se demander comment il n’a pas sombré dans la folie ou la délinquance et quel est le secret de sa résilience. Sans faire de la psychologie de comptoir, il est évident que sa guitare lui a servi de bouée.
Dans Kiss the Sky, on découvre aussi que c’était un enfant très timide. Oui, très timide et introverti. Il l’est d’ailleurs resté toute sa vie contrairement à ce qu’on pourrait croire quand on le voit se déchaîner sur scène. Dans la vie, il se tenait voûté, avait le regard fuyant et se mettait à bégayer dès qu’il se sentait mal à l’aise, mais dès qu’il montait sur scène, il se métamorphosait en fauve hypersexué.
Un homme timide mais un vrai tombeur... Tombeur mais pas séducteur. Les femmes venaient à lui plutôt qu’il n’allait à elles. Son mélange de sex-appeal et de timidité devait avoir sur elles un effet ravageur, sans compter le fameux charme du musicien. Mais comme on le montre dans Kiss the Sky, il a commencé par être très fleur bleue. C’est après s’être fait larguer par son grand amour de jeunesse qu’il s’est mis à collectionner les conquêtes.
Des conquêtes avec qui il pouvait se montrer violent... Oui, c’est un des côtés sombres du personnage. On vante souvent sa gentillesse et sa politesse, ce qui est totalement avéré, mais il lui arrivait d’être violent quand il était jaloux ou sous l’effet de l’alcool. Malgré toute notre affection pour Hendrix, il n’était pas question de faire une hagiographie, donc nous montrons aussi cette facette de sa personnalité.
Dans votre récit, vous le montrez hanté par sa mère, au point de craquer pour des femmes qui lui ressemblent. Quand il est né, sa mère avait dix-sept ans. Elle n’était absolument pas prête à s’occuper d’un enfant, d’autant qu’elle avait un penchant pour la fête et les hommes. Même si elle et son mari ont eu officiellement cinq enfants dont Jimi était l’aîné, elle a très peu rempli ses obligations de mère de famille. Elle pouvait disparaître pendant des semaines avant de revenir par surprise, d’où un effet de manque qui a conduit Jimi à l’idéaliser. Quand elle est morte à trente-deux ans dans des conditions sordides, il l’a vécu comme un cataclysme alors qu’il n’avait reçu d’elle qu’une affection très limitée. Sa propension à craquer sur des femmes qui lui ressemblaient n’est pas une licence poétique de notre part, c’est lui-même qui en a parlé.