Un été avec Montaigne
176 pages – Sortie le 16 mai 2013
prix éditeur : 12€
« Longtemps, je me suis demandé si j’oserais citer la conclusion très irrévérencieuse des Essais, au risque d’effaroucher les oreilles délicates […] : Ésope ce grand homme vit son maître qui pissait en se promenant. Quoi donc, fit-il, nous faudra-t-il chier en courant ? Ménageons le temps, encore nous en reste-t-il beaucoup d’oisif et mal employé.
Toute une philosophie de la vie est ainsi résumée en quelques mots frappants. Les hommes de la Renaissance ne faisaient pas tant de manières que nous et disaient franchement ce qu’ils pensaient. Le dernier chapitre des Essais, «De l’expérience», expose la sagesse finale de Montaigne, souvent associée à l’épicurisme. Prenons le temps de vivre ; suivons la nature ; jouissons du moment présent ; ne nous précipitons pas pour rien. »
En quarante chapitres, Antoine Compagnon interprète Montaigne d’une façon drôle et limpide : de la notion d’engagement jusqu’au trône du monde, en passant par la conversation, l’amitié ou l’éducation, le temps perdu et même le surpoids. Il montre à la fois l’épaisseur historique et la portée actuelle des Essais.
Un été avec Montaigne est à l’origine une série d’émissions diffusées sur France Inter pendant l’été 2012.
Écrivain, professeur au Collège de France et à la Columbia University, Antoine Compagnon est notamment l’auteur des Antimodernes et La Classe de rhéto. Il nous invite à découvrir un Montaigne estival et tonique.
Un flashcode au dos de la couverture du livre permet de réécouter la série d’été d’Antoine Compagnon.
Extraits choisis – Antoine Compagnon nous parle de Montaigne :
● à l’origine du projet
«Les gens seraient étendus sur la plage ou bien, sirotant un apéritif, ils s’apprêteraient à déjeuner, et ils entendraient causer de Montaigne dans le poste. Quand Philippe Val m’a demandé de parler des Essais sur France Inter durant l’été, quelques minutes par jour de la semaine, l’idée m’a semblé très bizarre, et le défi si risqué, que je n’ai pas osé m’y soustraire.»
● l’engagement
«D’après Montaigne, quand un homme public ment une fois, il n’est plus jamais cru ; il a choisi un expédient contre la durée ; il a donc fait un mauvais calcul. La sincérité, la fidélité à sa parole, est une conduite bien plus payante.»
● l’art de la conversation
«Montaigne regrette que ses contemporains ne le contestent pas assez, par hantise de se voir eux-mêmes contestés. Comme ils n’aiment pas être contrariés, que cela les humilie, ils ne contrarient pas, et chacun s’enferme dans ses certitudes.»
● la bonne foi
«La vertu capitale selon Montaigne, indispensable au fondement de tous les rapports humains, est la fides latine, qui signifie non seulement la foi, mais aussi la fidélité, c’est-à-dire le respect de la foi donnée, à la base de toute confiance. Foi, fidélité, confiance, et encore confidence, c’est tout un : mon engagement vis-à-vis de l’autre, comme on donne parole, comme on s’engage à tenir parole.»
● le voyage
«Le voyage me semble un exercice profitable. L’âme y remarque les choses inconnues et nouvelles, et je ne sache point meilleure école, comme j’ai dit souvent, à façonner la vie, que de lui proposer incessamment la diversité de tant d’autres vies, fantaisies et usances.»
● l’amitié
«L’amitié, c’est pour Montaigne le seul lien vraiment libre entre deux individus, lien inconcevable sous une tyrannie. C’est un sentiment sublime, du moins non pas l’amitié ordinaire, mais l’amitié idéale qui unit deux grandes âmes au point qu’on ne peut plus les distinguer.»
● la vocabulaire
«Selon Montaigne, tous les troubles du monde – procès et guerres, litiges privés et publics – sont liés à des malentendus sur le sens des mots.»
● l’orgueil
«Montaigne préfère avoir affaire à des hommes qui, pour le dire simplement, n’ont pas la grosse tête :
“J’en vois qui se transforment et se transsubstantient en autant de nouvelles figures, et de nouveaux êtres, qu’ils entreprennent de charges : et qui se prélatent jusques au foie et aux intestins, et entraînent leur office jusques en leur garde-robe.”»
● la lecture
«Montaigne compare la lecture à la digestion. Les leçons, comme les aliments, ne doivent pas être goûtées du bout des lèvres seulement, et gobées toutes crues, mais mâchées lentement, ruminées dans l’estomac afin de nourrir de leur substance l’esprit et le corps. Sinon, on les régurgite comme une nourriture étrangère.»
Et tout l’été sur France Inter de 12h55 à 13h du lundi au vendredi :« Un été avec Montaigne » par Antoine Compagnon et Daniel Mesguich. « Rien de plus facile à lire, on savoure ces quarante chroniques comme un petit pastis estival. »
Un été avec Montaigne, tiré au départ à 5000 exemplaires, a été réimprimé tout l’été, portant le tirage total de l’ouvrage à 100 000 exemplaires et les ventes à 70 000. Il figure aujourd’hui encore en tête des ventes Essais et Documents.