Biographie de Philippe Sarde
Philippe Sarde est né en 1948 à Neuilly-sur-Seine. Sa mère, Andrée Gabriel, mezzo-soprano à l’Opéra de Paris, démarre très tôt son éducation musicale. Il entre au conservatoire à l’âge de cinq ans. Quelques années plus tard, son père lui offre un projecteur huit millimètres. Le jeune Philippe se passionne alors autant pour la musique que pour le cinéma. À 17 ans, il tourne un court métrage dont il écrit également la bande originale, avec la complicité de Vladimir Cosma qui en assure l’orchestration.
C’est finalement dans le domaine de la musique de film que Philippe Sarde décide de persévérer.
En 1970, il rencontre Claude Sautet et le persuade de lui donner sa chance sur son troisième long métrage, Les choses de la vie, avec Romy Schneider et Michel Piccoli. Le film est un succès, et Philippe Sarde devient, dès lors, le compositeur que l’on s’arrache.
En quelques années, il s’affirme comme une figure incontournable du cinéma français. Il enchaîne les récits intimistes, comme Le chat en 1971 de Pierre Granier-Deferre et les drames populaires comme Deux hommes dans la ville de José Giovanni en 1973.
La crainte de se voir accoler l’étiquette de compositeur romantique, Philippe Sarde innove. Il rompt les digues entre les genres musicaux qu’il affectionne et, avec la bénédiction des cinéastes, mélange allégrement musique populaire et musique savante, musique classique et musique improvisée. Pour cela, il prend soin de s’adjoindre les services des meilleurs interprètes comme Chet Baker, Stéphane Grappelli, Didier Lockwood, Ivry Gitlis, Maurice André ou encore les Chieftains.
Il n’hésite pas à faire jouer les contrebassistes de jazz Ron Carter et Buster Williams au milieu des pupitres du London Symphony Orchestra quand il produit la bande originale du Choix des armes d'Alain Corneau. C’est également lui qui superpose les sonorités mélancoliques du saxophone de Stan Getz et les cordes du symphonique de Londres pour Mort d’un pourri en 1977, le film de Georges Lautner avec Alain Delon dans le rôle principal.
La carrière des années 1970 de Philippe Sarde ressemble à s’y méprendre à une cartographie du cinéma de cette époque. Il est alors le trait d'union entre l’arrière-garde et une nouvelle génération de cinéastes. Il devient le complice musical de réalisateurs qui cultivent des styles diamétralement opposés et alterne les films-chocs de Marco Ferreri, comme La grande bouffe en 1973, avec les films plus conventionnels de Claude Sautet, Max et les Ferrailleurs 1971, César et Rosalie 1972, Vincent, François Paul et les autres 1974, Mado 1976, Une histoire simple 1978 ou, avec Pierre Schoendoerffer, Le crabe tambour 1977 et L’honneur d’un Capitaine en 1982.
Il trouve des alliés parmi les jeunes cinéastes comme Bertrand Tavernier pour L’horloger de Saint-Paul 1974, Des enfants gâtés 1977, Coup de torchon 1981, André Téchiné, pour Barocco 1976 - son seul César - Hôtel des Amériques 1981, Rendez-vous 1985, Le lieu du crime 1986, Les innocents 1987 puis Roman Polanski pour Le locataire en 1976.
Grâce à lui, et à la musique remarquable du film Tess, en 1979, Philippe Sarde décroche une nomination aux Oscars.
Les années 1980 arrivent et Philippe Sarde est au sommet de sa popularité. Après une courte parenthèse à Hollywood, il continue de travailler avec les cinéastes français qui font le plein au box-office, comme Jean-Jacques Annaud, pour lequel il signe les musiques de La guerre du feu en 1981 et L’ours en 1988. Boulimique de travail, Philippe Sarde compose pour cinq à sept films par année.
Le rythme se réduit cependant dans les années 1990 et 2000. Une forme de cinéma audacieux et débridé, dont Philippe Sarde était l’une des incarnations, tend à s’effacer. Claude Sautet meurt en 2000 et le cinéma français voit disparaître ses plus grands représentants. Les moyens diminuent, l’heure n’est plus aux grandes formations, aux grandes envolées.
Jacques Doillon, Raja en 2003, Le mariage à trois en 2010, Rodin en 2017 ou Bruno Podalydès avec Le Mystère de la chambre jaune en 2003, Le parfum de la dame en noir en 2005 et quelques cinéastes en devenir, comme Louis Garrel avec Les deux Amis en 2015, L’homme fidèle en 2018, puis, dernièrement, Jean-Paul Lilienfield avec Juliette dans son bain en 2022 font appel à lui. C’est avec ce dernier film que Philippe Sarde remporte le Prix de la Meilleure Musique lors du festival TV de Luchon en 2022.
Philippe Sarde est l'un des rares compositeurs de musique de film à n'avoir quasiment travaillé que pour l'écran. Ne parvenant pas à composer pour lui-même et ayant absolument besoin des autres, il n'a jamais écrit de musique destinée au concert (opéras, symphonies ou concertos), même s'il a parfois joué sur scène en tant que pianiste, notamment lors du septième Festival du Cinéma et Musique de Film de la Baule dont il était l'invité d'honneur en 2021 pour ses 50 ans de carrière.
À cette occasion, sort, pour la première fois, un coffret intitulé Anthologie de musiques de films - 50 ans de cinéma regroupant des extraits d’une centaine de musiques de films sur les 250 composées par Philippe Sarde. Le temps de l’écoute de ces six disques, l'auditeur est convié à un véritable voyage cinéphile dans un condensé de partitions qui ont marqué durablement le cinéma. Cette anthologie vertigineuse rappelle, si besoin est, qu’en matière de diversité, de productivité et, surtout de talent, Philippe Sarde a la carrure d’un Ennio Morricone ou d’un Jerry Goldsmith.