LSD, la série documentaire propose une semaine exceptionnelle autour d’un sujet longtemps resté tabou : l’inceste. 4 épisodes forts de témoignages croisés de victimes, médecins, chercheurs, juristes et représentants d'institutions. Ces paroles ouvertes abordent avec une profondeur rarement atteinte un sujet difficile et portent les droits de l’enfant au centre du débat de notre société.
1er épisode : La loi du silence
« L’inceste serait un « tabou », un acte interdit qui toucherait au sacré ou à l’impur et dont la transgression, rare, serait tenue secrète, au risque de polluer la société.» Léonore Le Caisne, Directrice de recherche au CNRS.
La perception sociale et culturelle de l’inceste a évolué au fil des siècles. « Au Moyen Âge, l’inceste était considéré comme un acte consenti et non comme une violence sexuelle imposée à l’enfant » Fabienne Giuliani, historienne.
Dans la société patriarcale du XIXe siècle, on faisait peu de cas des atteintes à l’intégrité morale des enfants violentés. Le déni et la loi du silence dominaient. Mais comment la société n’a-t-elle pas saisi plus tôt l’impact de cette monstruosité ? Comment a-t-elle laissé faire ?
Aujourd’hui la reconnaissance de cette violence incestueuse et l’affirmation de l’enfant comme sujet de droits nous ferait-elle espérer la fin d’une époque de la domination et de la toute-puissance ? Une plongée dans l’histoire de ce crime généalogique sous le poids du secret pour interroger la manière dont il prospère dans les silences familiaux, les peurs des enfants et les sentiments destructeurs de culpabilité.
Avec Vanina, Eden, Marie, Anne, Angèle, Antoine, Dorothée Dussy anthropologue, Fabienne Giuliani historienne, Marc Crépon philosophe.
2e épisode : Police justice au cœur du déni
La caution du déni, l’aliénation parentale, des concepts qui marchent et des mécanismes qui disent aussi quelque chose de la société que l’on fait.
On sait désormais qu’entre 5 et 10% des Français ont été victimes de violences sexuelles dans l’enfance, le plus souvent dans la sphère familiale. Pourtant le système juridique est gravement défaillant. 70% des affaires d'inceste sont classées sans suite. De nombreuses autres aboutissent à un non-lieu. 1% seulement des auteurs d'inceste sont sanctionnés pénalement. Première cause, la lenteur des enquêtes, mais aussi la non reconnaissance de la parole des victimes. Pourtant, il s’agit bien d’un crime.
Mais pourquoi la justice française a tant de mal à croire les victimes ? Pourquoi lorsqu’une mère porte plainte on ne la croit pas, et on la culpabilise ? C’est l’histoire d’une mère qui est mal reçue par justice. Une très longue histoire parmi tant d’autres.
Avec Jessika, Marie, Sébastien, Colin, Ernestine Ronai responsable de l’Observatoire départemental des violences envers les femmes de Seine Saint-Denis, Emmanuelle Piet médecin, Edouard Durand juge pour enfants et co président de la CIIVISE, Muriel Salmona psychiatre, les brigadiers de la brigade de la famille de Nîmes, Cécile De Olivera avocate
3e épisode : Prendre en charge les agresseurs
Quelle est la prise en charge possible pour des hommes considérés comme dangereux ?
Au CHU de Montpellier, dans l’unité de soins Urgence et Post-Urgence Psychiatrique de l’hôpital Lapeyronie, des patients viennent en consultations spécialisées et répondent aux questions du Dr Lacambre. Dans ce centre ressource pour les intervenants auprès des auteurs de violences sexuelles toute l’équipe tente d’apporter des soins pour les personnes présentant des déviances ou perversions sexuelles. Outre les entretiens individuels et la thérapie de groupe certains sont aidés de médicaments anti-androgènes, ou une reprise de parole avec la famille brisée. Ouvert depuis une dizaine d’années, le service assiste à des demandes qui ne cessent d’augmenter, en 2021, plus de 400 personnes ont été suivies. En France cette clinique de la prévention, au carrefour de la psychologie et de la criminologie, est compliquée à mettre en marche, tant il existe des réticences de société à s’occuper des agresseurs.
Avec le Dr Mathieu Lacambre, psychiatre et responsable de la filière de psychiatrie légale au CHU de Montpellier- hôpital Lapeyronie, les patients, Magali Bodon Bruzel psychiatre, Linda Tromeleue psychologue clinicienne
4e épisode : Enfin une prise de conscience collective
On dit souvent aux victimes d’inceste "il faut parler", mais n'est-ce pas d'abord à la société et aux professionnels de l'enfance de provoquer cette parole ?
Est-on en train de vivre un moment historique ? « Va t-on enfin être capable d’être dans la culture de la protection, d'anticiper les faits par le repérage systématique et pouvoir recueillir la parole des victimes » s’interroge Edouard Durand juge pour enfants et co président du CIIVISE.
Dans un bureau du ministère de la santé, dans un foyer ou en pleine audition de victimes dans une ville de France, Edouard Durand et Nathalie Mathieu recueillent la parole pour mieux soigner et protéger. La société va-t-elle enfin prendre conscience de l'ampleur des violences sexuelles pendant l'enfance et la gravité des traumatismes éprouvés par les victimes ? Au cœur de cette commission il y a le recueil des témoignages pour mieux protéger les victimes. Mais il y a aussi la construction d’un meilleur savoir, pour les pouvoirs publics et pour la société, pour mieux comprendre le phénomène et surtout mieux le repérer. Des enquêtes, des recherches, et un programme de prévention. Telle sera la mission de la Commission Indépendante sur l'Inceste et les Violences Sexuelles faites aux Enfants dans laquelle notre documentaire sera plongé.
En ligne sur le site de France Culture, dès le 3 janvier :
Comment soigner les victimes d'inceste ? En complément de sa série LSD, Johanna Bedeau mène un long entretien avec la psychiatre Muriel Salmona.
> Les sonores sont disponibles en avant-première sur simple demande auprès du service presse.
Crédits photos : Getty _ David Izquierdo